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Les randonnées pédestres d' EVASION CATALANE
31 mars 2021

La Massane au départ de Valmy. Rando Cassini.

"Voilà encore une belle randonnée comme on les aime !" Telle a été, à notre retour à Valmy, l'appréciation unanime des 18 du groupe mené par Jean-Pierre, Jean-Paul et Jean-Marc. Cette dernière rando du mois de mars 2021, ce mardi 30, visait haut, tout en restant dans les Albères : la tour de la Massane, au départ de Valmy. Avec comme intention programmée de parcourir 17 km pour 950 m de dénivelé. Promesse  presque tenue : 15,3 km de réalisés pour 900 m de dénivelé. En plein milieu, et tout là-haut, elle a été dédiée au grand savant du XVIII ème siècle Jacques Cassini pour célébrer le 320 ème anniversaire des mesures qu'il a effectuées à la tour de la Massane en mars 1701.

       Notre belle rando a bien commencé : sur un vrai petit sentier secret reliant Valmy à la chapelle Saint-Laurent, coupant plusieurs fois la piste. Nous avons pris de l'altitude au milieu des chênes-lièges, des bruyères arborescentes, des cistes, des arbousiers et d'autres arbustes à fleurs jaunes.

           Avant de parvenir à Saint-Laurent nous sommes passés près d'un mas du Moyen-Âge en ruines, appelé "le Mas de la Monja" (en français : la ferme de la religieuse, de la soeur).  Question : "Jean-Marc, est-ce qu'on connaît le nom de cette soeur, de cette religieuse qui habitait ici ?" - "Non ! On ne connaît pas son nom, mais on a quand même une réponse !" - "Ah oui ? Laquelle ?" -"En catalan, ça pourrait donner : "le mas de la nonna Nima", mais en français cela donne : "le mas de la nonne Nyme" - "Ah ben oui, compris ! Merci, Jean-Marc !"

         Agréable halte au pied de la chapelle Saint-Laurent.

             L'actuelle chapelle Saint-Laurent, bâtie au XII è siècle (époque de l'architecture romane), sur l'emplacement d'une autre église plus ancienne, mentionnée par un écrit du roi Lothaire de France  daté de 981. Elle était l'église d'une paroisse dont les maisons et mas ont disparu au cours des siècles avec l'exode rural. Ces bois d'Argelès étaient autrefois peuplés et leurs pentes étaient cultivées. Elle portait aussi le nom de "Saint-Laurent du Mont au lieu-dit Ravaner" (un lieu raviné). Ce mont surplombe Argelès à 300 mètres d'altitude. La plupart des maisons de cette paroisse se trouvaient dans la vallée du Ravaner, au lieu de l'actuel Mas Consul ou Mas Consol et cette paroisse s'appelait alors "Sant Pere de la Cellera" ou "Sant Pere dels Forquets". Lorsque les habitants ont abandonné leurs maisons, au cours du XVII ème siècle, cette paroisse Saint-Pierre n'a plus eu de curé, a été oubliée, et l'ancienne église du Mont (ou Saint-Laurent) a perdu son titre d'église paroissiale pour devenir une chapelle, bientôt tombée à l'abandon. Bien restaurée par des bénévoles vers 1990, elle a été classée Monument Historique en 1994. Tous les ans, le 10 août, jour de la saint Laurent, un office continue à y être célébré, avec les paroissiens d'Argelès.

            Notre montée s'est poursuivie sur sentiers, jusqu'au col de Pomer, et à midi nous étions à la tour de la Massane. Nous avions retrouvé le soleil, étant grimpés bien au dessus des nuages qui, peu à peu, et durant le pique-nique, se sont écartés, tel un rideau de théâtre, nous dévoilant un panorama magnifique. 

A notre droite, vers l'est, la côte rocheuse, la Côte Vermeille, avec ses perles, Collioure et Port-Vendres dominé par son mont Béar. Sous la tour de Querroig on pouvait deviner Banyuls, jusqu'à Cerbère. Et même, tout au fond, le cap Creus et la plaine de l'Emporda. Plus proches, nos repères amis, le fort Saint-Elme et la tour de la Madeloc.

A gauche, vers l'ouest, au fur et à mesure que le rideau de nuages s'ouvrait, se dévoilaient la plaine du Roussillon et les crêtes des Corbières. Et l'imposant Canigou enneigé, dans le fond un peu plus à gauche. Droit devant, face au nord, et un peu plus tard, apparut le golfe du Lion dans sa spendeur, avec sa large courbe sableuse menant jusqu'au Canet. On n'aperçut pas aujourd'hui, à cause du brouillard apporté par le "marin", ni la falaise de La Franqui ni le mont Saint-Clair de Sète. Mais nous les savions là !

Alors, cette tour de la Massane ? C'est le petit fleuve appelé "la Maçana", descendant des Albères, sa source étant entre le col de la Cabbasserra et celui del Terrers, qui a finalement donné son nom à la tour et au massif montagneux. Autrefois, dans un écrit de 1293, elle s'appelait "la Torre de Perabona".

          Cette tour, comme celle de Cadaquès, celle de Querroig, et la Madeloc, faisait partie depuis le IX ème siècle d'un système de guet pour avertir les populations côtières de l'arrivée des navires de ''pirates'' et des armées arabo-islamiques qui pullulaient dans cette partie de la Méditerranée abandonnée par les Romains à partir du V ème siècle. Ces barbares fondaient sur les villages côtiers, volaient, violaient, détruisaient, pillaient et repartaient vite avec leur butin. Dès le 9 ème siècle il y eut des tours de vigie en bois, comme celle de saint-Elme, apelée "la Guardia". Puis, aux XIII è et XIV è siècles, sous le règne des rois de Majorque qui étaient vassaux du roi d'Aragon, ces tours furent construites en dur, en pierre, avec une citerne intérieure, un logis, un magasin, un système d'alarme : ce système était un foyer au sommet des tours, capable de produire de la fumée plus ou moins foncée et abondante selon le message à envoyer au loin.

Les guetteurs installés dans ces tours, et apercevant un mouvement de navires inquiétants sur la mer, alertaient leurs collègues des autres tours par des fumées plus ou moins noires, jusqu'à ce que le signal atteigne le château des rois de Majorque du centre de Perpignan. Ainsi alertées, les populations de toute la côte pouvaient monter se réfugier auprès des soldats.

   Au  XVI è siècle, l'empereur Charles-Quint fortifia le fort saint-Elme à l'aide de bastions. Les tours de Madeloc et de la Massane furent équipées de canons pouvant alerter les populations par des tirs sonores; ceci jusqu'au XVIII è siècle.

               Juste en dessous de la Massane, après le pique-nique, en faisant une petite pause sur l'aire appelée "la Place d'Armes", Jean-Paul fit cette proposition : " Il y a, tout près d'ici, le petit refuge d'altitude Arago. Mais on pourrait dédier cette randonnée au grand savant Cassini qui est monté ici, à la tour de la Massane, il y a 320 ans, le 12 mars 1701. Pour marquer ce 320 ième anniversaire, nous pourrions appeler cette rando d'aujourd'hui "la rando Cassini"."

- "Quel Cassini ? C'était une dynastie, une famille de plusieurs grands savants !"

- Pas l'astronome (son père) ni le cartographe (son fils) mais Jacques Cassini, qui fut chargé en 1701, sous Louis XIV, de déterminer le méridien reliant de façon conventionnelle Dunkerque au Canigou en passant par Paris. Il a utilisé la tour de la Massane comme repère géodésique. Plus précisément, c'est le 12 mars 1701 qu'il y est monté depuis Collioure. Parvenu au pied de la tour, il effectua un calcul de triangulation, en utilisant le théorème de Pythagore (le carré de l'hypothénuse est égal à la somme des carrés des deux autres côtés), mais aussi en observant sur ses tubes et ses instruments les mesures barométriques (la pression atmosphérique lui indiquait l'altitude sur une échelle graduée). Ainsi il a pu calculer précisément pour la première fois  la hauteur de ce sommet des Albères. Nous pouvons confirmer ses calculs grâce à nos modernes GPS utilisant les renvois d'ondes, les mesures prises par les satellites : nous sommes bien à 793 mètres d'altitude. Avouons humblement que nous avons moins de mérite et de science que Cassini ! Et qu'il avait d'aussi bons mollets que nous !"

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                   Avant de rejoindre le parking de Valmy, loin-loin tout en bas, par les sentiers  bordés de haute bruyère, nous avons salué les 3 dolmens de notre itinéraire. Les archéologues ont dénombré 16 dolmens ("tables" en breton) et 3 menhirs ("pierres levées") restant dans la région (le versant nord du massif des Albères), datant du néolithique (entre 2000 et 4000 ans avant notre ère) et témoignant du peuplement par des populations n'ayant pas encore eu accès ni à l'invention du métal ni à celle de l'écriture. Il s'agissait de sépultures collectives utilisées par les populations pendant plusieurs siècles.

               Après le dolmen dels Forquets (en très mauvais état), celui dels collets de Cotliure (très ruiné lui aussi), c'est le dolmen de la Cova de l'Alarb qui a le mieux résisté à l'érosion et aux déprédations de plus de 3 millénaires au moins. Le nom de ce dernier dolmen a une origine amusante : "de l'Alarb". Comme les populations catalanes tardives des montagnes d'Argelès, durant le Moyen-Âge, ignoraient la longue histoire, trois fois millénaire, de leur région, et qu'il y eût une histoire paléolithique et néolithique, avec des hommes dits préhistoriques, donc avant l'Histoire écrite transmise par les livres, ils ne savaient comment expliquer l'origine de ces abris faits de mégalithes aux poids impressionnants et qui ne correspondaient à rien de ce qu'ils connaissaient. Dans certaines régions de France, les paysans attribuent ces constructions inhabituelles à des fées ("la Roche aux Fées"), au Diable, à des Esprits surnaturels. Ici, les paysans se transmettaient de parents à enfants le souvenir de l'incroyable passage de guerriers orientaux complètement différents en tout, qui conquirent et dirigèrent la Septimanie, dont la Narbonnaise, de 720 à 760 : c'étaient les Arabes musulmans en djihad, en conquête sainte pour l'islam. Ces Omeyyades  (Berbères convertis à l'islam) étaient passés d'Afrique en Espagne en 711 (seulement 80 ans après la mort de Mahomet en 632) et avaient conquis Narbonne en 719. Les imaginations des populations conquises, bousculées par ces envahisseurs orientaux, menacées de conversion à l'islam, avaient été profondément marquées pour des siècles, même après que les "Arabes" aient été chassés de Narbonne en 762 par le fils de Charles Martel, Pépin-le-Bref, puis par son fils, Charlemagne qui les pourchassa au-delà des Pyrénnées. Le mot "l'Arabe" ou son approchant mal prononcé "l' Alarb" dû à une méconnaissance historique, désigna longtemps un personnage mystérieux, presque mythique, une force qui était passée "autrefois" par là et dont on ne savait finalement rien de précis, sauf son étrangeté et sa sauvagerie. La construction des curieux abris de très gros blocs de pierre pouvait donc être attribuée à ces êtres mystérieux comme à une force surnaturelle imaginaire appelée "lalarb". Les paysans ignoraient qu'il y avait au moins trois millénaires d'écart entre les  populations du néolithique qui édifièrent ces sépultures de pierres énormes et les invasions musulmanes de 720 qui ne construisirent rien ici ! Mais le nom est resté au dolmen : "la cova de l'Alarb", la grotte de l'Arabe. 

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Le château de Valmy 

Nous ne l’avons pas visité avec notre groupe, mais ce château est ouvert à la visite hors de cette période de restrictions sanitaires. Et l’on peut même déguster un repas exceptionnel dans son restaurant gastronomique, en sirotant les excellents vins du cru.

En bref : c’est un château de la « Belle époque », construit entre 1888 et 1900. Avec ses « dimensions extravagantes, ses clochetons travaillés, ses tourelles élancées, ses hautes fenêtres asymétriques, ses bow-windows et ses médaillons floraux en céramique, etc » il se présente comme un mélange harmonieux de styles art-nouveau.

Son histoire est donc récente (il a 120 ans), mais elle n’est pas banale.

La fabrication et la vente du papier à cigarettes JOB, mis au point par Jean Bardou, fait un tabac et assure la fortune à son fils Pierre qui n’hésite pas, pour répondre à la demande des rouleurs de cigarettes, à agrandir ses usines à Perpignan. Les fumeurs l’enrichissent, tout en pestant bien sûr contre les riches ! La rengaine n’a pas varié.

 Pierre a 3 enfants : en 1885, il commande au même architecte la construction de 3 châteaux ! Son fils Justin hérite du château d’Aubiry à Céret. Sa fille Camille hérite du château Ducup de Saint-Paul, aux portes de Perpignan (un château aujourd'hui en bien mauvais état). Et sa fille Jeanne prévoit de s’installer dans celui de Valmy à Argelès.

     Jeanne ne s’est pas mariée avec n’importe qui, mais en 1888  (donc l’année du début de la construction de son château) avec Jules Pams, grande figure politique de la 3 ème République (il est président du Conseil Général des Pyrénées-Orientales, député, sénateur, ministre de l’Agriculture, puis ministre de l’Intérieur sous Clémenceau, et candidat malheureux à la présidence de la République en 1913 : ce fut Raymond Poincaré qui fut élu). Notre amie Irène nous a livré ce témoignage personnel lors d’une rando : « Ma grand-mère paternelle m’a raconté comment elle a parlé un jour au député Jules Pams parce que, en vivant dans le hameau pauvre et isolé de la Pava, elle voulait que ses enfants aient une situation. Et c’est ainsi que mon père, jeune homme, a pu entrer dans la police grâce au député ; et il y a fait toute sa carrière. »

            Le bâtiment qui est devenu l'actuelle mairie de Port-Vendres a été offert à la commune par Jules Pams. Jules Pams et son épouse sont inhumés au cimetière de Port-Vendres dans le caveau familial monumental surmonté par cette Victoire ailée qui veille sur son monde (photo ci-dessous). 

Le château de Valmy fut vendu en 1930 (à la mort de Jules Pams) à un distillateur qui étendit le domaine viticole qui l’entoure, domaine qui fait aujourd’hui 24 hectares. Il appartient toujours à ses descendants. Il est ouvert en hôtel et restaurant de haut de gamme.

Victoire Pams 3

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 Statistiques qui peuvent vous intéresser (ou pas)

Il y a quelques semaines je vous avais indiqué que de nombreux lecteurs de notre blog se trouvaient curieusement sur le territoire des U.S.A., ils sont parfois plus de 50%, selon les informations statistiques fournies par Canalblog, l'hébergeur de notre blog.

Une des explications pouvait être le jumelage entre Port-Vendres et la ville-port de Yorktown en Virginie sur la côte est. Mais ce n'est qu'une supposition. Les lecteurs ne se manifestent pas et n'indiquent pas leurs motifs de consultation de notre blog. Les données statistiques de lundi dernier 29 mars nous indiquaient que les visiteurs américains de notre blog (ou tout au moins se connectant depuis les U.S.A.) étaient depuis quelques jours à 85%, contre seulement 15% se connectant depuis la France.

Etrange, n'est-il pas ? 

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